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Transition médicale chez les mineurs : un peu de contexte

À l’origine : une expérience hollandaise 

Depuis les années 2010, des mineurs peuvent recevoir des traitements médicaux pour modifier leurs caractéristiques sexuelles, suite aux résultats d’une expérience hollandaise appelée Dutch Protocol. Dans cette expérience, des jeunes ont reçu des bloqueurs de puberté (entre 11 et 14), puis des hormones sexuelles croisées (testostérone, œstrogène..), de 16 ans, à vie, puis une chirurgie génitale dès 18 ans. 

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... Diffusée de manière incontrôlée

Cette expérience innovante, documentée dans 2 études (2011 et 2014), a été rapidement et largement adoptée dans la pratique clinique sans passer dans un cadre de recherche clinique visant à évaluer si les avantages l’emportent sur les risques.

 

 Malheureusement :

  • les supposés avantages psychologiques des bloqueurs de puberté n'ont pas pu être répliqués1.

  • de nombreux chercheurs ont mis en évidence les faiblesses méthodologiques des 2 études et l'inapplicabilité2 du protocole au profil de la population actuelle. 

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Ce protocole a fait l’objet d’un documentaire hollandais (The Transgender Protocol, oct. 2023, sous-titres anglais) diffusé à la TV hollandaise.

La 2e partie traite des bloqueurs de puberté (10 min).

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→ En savoir plus : Dutch Protocol

Documentaire Dutch Protocol, dysphorie de genre mineurs, transidentité transition mineurs

Intégration de cette expérience dans la directive de la WPATH

WPATH SOC dysphorie de genre transidentité mineurs

Le Dutch Protocol a ainsi été intégré dans de nombreuses directives, dont la plus suivie à l’international : les « standards de soins » de l'Association professionnelle mondiale pour la santé des personnes transgenres, WPATH.

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L'approche transaffirmative (modèle d'affirmation de genre)

Cette directive recommande l’approche transaffirmative : affirmer le genre sans explorer les raisons, puis proposer en unique option des traitements hormonaux/chirurgicaux (une « évaluation biopsychosociale » étant recommandée chez les adolescents avant l’accès à ces traitements).

Les différents troubles psychiatriques sont interprétés comme étant consécutifs à la transphobie ou à un environnement non affirmant (modèle du « stress minoritaire »), y compris quand ceux-ci sont pré-existants à l'apparition de la dysphorie de genre.

Cette approche repose sur la croyance que la dysphorie de genre ne disparaît jamais d’elle-même (il existe des preuves croissantes pour la contredire).​

Un éloignement des principes de la médecine fondée sur les preuves

Cette directive n’est pas fondée sur les preuves : en effet, durant l’élaboration de leur directive, cette organisation a déployé de gros efforts pour supprimer la publication d’informations fondées sur des preuves concernant les interventions médicales pour la dysphorie de genre car ces preuves ne soutenaient pas les hormones et bloqueurs de puberté chez les mineurs. 

 

→ En savoir plus : La WPATH a supprimé des preuves.

Article The economist WPATH-dysphorie de genre transition -transidentite-mineurs

D’autres directives s’éloignent du modèle trans-affirmatif

Avec l’explosion des cas (explosion depuis 2013), certains pays comme l'Angleterre, la Suède et la Finlande ont remis en question ces traitements : ils ont commandé une évaluation des preuves. Aujourd'hui, leurs directives, fondées sur les preuves et centrées sur la sécurité du patient, privilégient des interventions psychosociales moins invasives.

(en savoir plus : Quelques pays pionniers)

 

L’Angleterre a en particulier mené un examen de ses services de genre mineur, qui se base sur les revues systématiques les plus vastes et les plus complètes à ce jour, sur le vécu d’usagers et l'expérience des cliniciens. Le rapport final de cet examen est sorti en avril 2024 et a des retombées majeures. Le gouvernement anglais, travailliste, a prévu de mettre en œuvre ses recommandations.​

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→ En savoir plus : Cass Review, contexte.

Revues systématiques ayant documenté le Cass Review, examen indépendant des services de genre en UK

Pourquoi ces pays ont-ils changé d'approche ?

Les raisons pour lesquelles ces pays ont changé d’approche reposent principalement sur les défis dans la prise de décision clinique :

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Difficultés pour évaluer si l'intervention proposée est cliniquement indiquée 

Selon le Cass Review (16.8) : « Un diagnostic formel de dysphorie de genre n'est pas fiable pour prédire si ce jeune aura une incongruence de genre durable à l'avenir, ou si l'intervention médicale sera la meilleure option pour lui. En fonction de ce qui a causé sa détresse ou sa dysphorie, celle-ci peut être résolue par un traitement médical, mais elle peut aussi être résolue par d'autres manières ». (documenté par la présence de multiples co-morbidités psychiatriques de ces jeunes, des études sur la permanence de la  dysphorie de genre, l’existence des détransitionneurs, le fait que les jeunes sont dans une période de développement de leur identité).

 

Impossibilité de donner des informations appropriées sur les risques, les avantages et les résultats attendus du traitement

Selon le Cass Review (16.14, 16.18) : « Les revues systématiques [commandées par le Cass review] (...) ont montré (...) qu'il n'existe pas de preuves solides pour soutenir l'utilisation des bloqueurs de puberté et des hormones masculinisantes/féminisantes chez les adolescents, et les avantages et les risques associés à ces traitements sont inconnus. (...) Le devoir de communication d'informations est compliqué par de nombreux éléments inconnus concernant les impacts à long terme des bloqueurs de puberté et/ou des hormones masculinisantes/féminisantes ».

 

Difficulté d’évaluer si le jeune est capable de consentir au traitement endocrinien

Selon le Cass Review (14.25) : « Les données [montrant que l’immense majorité des jeunes sous bloqueurs poursuivent par les hormones sexuelles croisées] suggèrent que les bloqueurs de puberté n'offrent pas du temps pour réfléchir (...). C'est sur ce constat que la Haute Cour dans l'affaire Bell c. Tavistock a suggéré que les enfants/jeunes devraient comprendre les conséquences d'un parcours de transition complet afin de consentir au traitement par des bloqueurs de puberté ».

Ces conséquences sont entre autres : perte de fertilité, impact sur la fonction sexuelle. Un jeune de 14 ans peut-il consentir à devenir un adulte stérile ?

Des traitements médicalement nécessaires car salvateurs ?

L'argument des professionnels trans-affirmatifs pour justifier le traitement endocrinien est qu'il « sauve des vies » : l’alternative à ce traitement serait selon eux, la mort par suicide.

Mais selon le rapport final du Cass Review (15.43) : « Les preuves ne soutiennent pas de manière adéquate l'affirmation selon laquelle le traitement d'affirmation de genre réduit le risque de suicide ». (en savoir plus : Vrai/Faux sur cette question)

Et la France dans tout ça ?

  • En février 2022, se basant sur le modèle suédois, l’Académie de médecine a publié un communiqué appelant à la prudence.

  • Dans la pratique, les consultations sur les transidentités suivent généralement les « standards de soins » de la WPATH.

  • L’HAS (Haute autorité de santé) est en train d’élaborer des recommandations de bonnes pratiques concernant le parcours de transition des personnes transgenres de plus de 16 ans. Les recommandations s'aligneront probablement avec un rapport remis au ministère de la Santé en janvier 2022.

  • En mai 2024, le Sénat a adopté en 1re lecture une Proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre. 

  • Du côté de l'Éducation nationale, une directive a été publiée en septembre 2021 (« Circulaire Blanquer ») : Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l'identité de genre en milieu scolaire : «  Dans tous les cas, l'établissement scolaire doit être attentif à garantir les conditions d'une transition revendiquée (...) ou confidentielle (...) ».

 

En savoir plus : contexte français.​

1. Les résultats de cette expérience ont essayé d'être répliqués :

  • en Angleterre : early intervention study dont les résultats préliminaires en 2015-2016 n'ont pas démontré de bénéfice. Les résultats de l'étude n'ont été formellement publiés qu'en 2020 (les auteurs ayant eu des réticences à publier).

  • aux US : vaste étude initiée en 2015, financée par le NIH National Institutes of Health ; les résultats semblent montrer que les bloqueurs de puberté sont sans effet sur la santé mentale : l’auteure principale refuse de publier ces résultats pour des raisons politiques.

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2. Aujourd'hui, la plupart des jeunes présentent une dysphorie de genre post-pubertaire et divers troubles mentaux/conditions neurodéveloppementales, deux présentations cliniques que les Néerlandais ont explicitement exclus de leur protocole.

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note 2
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