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Recommandations HAS transgenres : ce que la tribune de Libération oublie de dire

Dernière mise à jour : 21 avr.

Tribune liberation transition mineurs transidentité HAS

Le 31 janvier 2025, Libération publiait la tribune : « Face à la vague transphobe, la Haute Autorité de santé se doit de protéger les mineurs » (disponible en entier ici). Cette tribune entend défendre les futures recommandations transgenres l'HAS (« Parcours de transition des personnes trans » de plus de 16 ans), dont le contenu (à l'étape de relecture) avait été publié par Le Figaro en décembre 2024.


Mais que valent vraiment leurs arguments ? Voici une analyse détaillée et documentée des principales affirmations. (Analyse disponible en pdf).

1. « Le rapport Cass (...) n’a pas dévoilé l’ensemble de ses auteurs »❌

Cette affirmation repose sur une confusion entre un Examen indépendant (comme le Cass Review) et un guide de pratique clinique (comme les recommandations de la HAS).

Un Examen indépendant (comme celui des services de genre pour mineurs au Royaume-Uni), suit une méthodologie spécifique :

  • une présidence extérieure au champ est nommée pour diriger l’Examen,

  • des intervenants variés sont consultés pour éclairer la réflexion,

  • mais les recommandations finales sont rédigées uniquement par ce président, ici la Dre Cass.


⇒ La divulgation des noms des participants n’est ni exigée, ni appropriée dans un tel cadre. Les personnes consultées ne sont pas co-auteurs et ne forment pas un groupe chargé de recommandations. Cette exigence est donc hors de propos.

🔎 En savoir plus sur cet Examen, dont les recommandations s'éloignent du modèle trans-affirmatif recommandé dans les futures recommandations de l'HAS.

2. « Ceux qui sont connus n’ont aucune expérience clinique du sujet, y compris la Dre Cass »✅

C’est exact, mais c'est précisément l'un des critères de sérieux d’un Examen indépendant : le fait que la personne qui le dirige soit à distance du domaine étudié limite les biais liés aux conflits d’intérêt ou aux positions militantes. Cela permet de garantir une approche critique et impartiale, centrée sur les preuves.

 

3. « Des recommandations médicales ne peuvent pas être fondées sur l’opacité et l’ignorance »❌

Effectivement. Mais ici, c’est bien la HAS qui a fait preuve d’opacité. Elle a refusé de dévoiler les noms de ses experts malgré les demandes publiques, jusqu’à ce qu’elle y soit contrainte par une décision de justice (tribunal administratif de Montreuil, février 2024). Elle a ensuite déposé un pourvoi en cassation et demandé un sursis à exécution.

Les noms de ces membres peuvent être retrouvés via les déclarations publiques d’intérêt sur le site du ministère de la santé. Comme l’a révélé  Le Figaro, la plupart sont des professionnels ayant pris publiquement position en faveur des revendications des associations transactivistes. Une seule experte (critique de ces positions) a siégé brièvement, avant de démissionner, jugeant la composition du groupe trop partiale.

🔎 Post sur le contenu des futures recommandations de l'HAS sur ce sujet.

4. « Une similarité entre les recommandations de la HAS et de la WPATH n’aurait rien de surprenant puisque les deux instances s’appuient sur la même base publique de données probantes. »❌

C’est inexact. La WPATH (association ayant publié ses 8e « standards de soins » en sept. 2022, qui constituent la référence des militants trans), a commandé des revues systématiques à l’Université Johns Hopkins (UJH). Ces revues ont bien été rédigées, mais une majorité d’entre elles n’ont jamais été publiées, car les résultats ne soutenaient pas les recommandations souhaitées par la WPATH.

En savoir plus dans le point 8.

 

5. « le rapport Cass a exclu 48 % des études sur les bloqueurs de puberté et 36 % des études sur les hormones sexuelles, en violation de (...) toute rigueur scientifique »❌

Cette affirmation est trompeuse à plusieurs titres.

➥ Tout d’abord, ce ne sont pas les auteurs du Cass Review eux-mêmes, mais l’équipe de recherche indépendante de l’Université de York, mandatée pour réaliser les 7 revues systématiques, qui a procédé à cette sélection.


Ensuite, concernant par exemple les bloqueurs de puberté : les 48 % d’études mentionnées n’ont effectivement pas été incluses dans la synthèse narrative de la revue systématique sur ce sujet : non pas parce qu’elles n’ont pas été examinées, mais parce qu’elles ont été évaluées comme étant de faible qualité méthodologique. Il s’agit d’une procédure parfaitement standard et recommandée dans une revue systématique, qui a précisément pour but de ne retenir que les données les plus robustes.

Donc, en réalité :

  • Ces études ont été évaluées pour leur qualité avant d’être exclues de la synthèse narrative de la revue concernée.

  • L'outil d’évaluation utilisé dans cette revue (échelle de Newcastle-Ottawa) est reconnu pour être plus indulgent que d’autres outils plus stricts comme ROBINS-I. Malgré cela, presque la moitié des études ont été jugées de faible qualité.

  • Exclure des études de faible qualité est non seulement une pratique courante, mais une exigence méthodologique en médecine fondée sur les preuves : inclure de mauvaises études reviendrait à fausser toute la synthèse.

  • Les critères d’exclusion ont été expliqués de manière transparente dans les revues systématiques qu’ils ont publié : « En raison du risque élevé de biais dans les études de mauvaise qualité, celles-ci ont été exclues de la synthèse ».


⇒ Contrairement à ce que la tribune laisse entendre, le Cass Review ne néglige aucune donnée probante : il s’appuie au contraire sur l’ensemble des études disponibles, en tenant compte de leur qualité.


Nous verrons dans le point 8 qu'en réalité, c'est la WPATH qui a violé les principes de rigueur scientifique.

🔎

6. « Parmi les études écartées, la plus impactante d’entre elles (...) »❌

Tout d’abord, l’étude citée (celle de (Chen et al. janvier 2023)) n’a pas été « écartée » par la revue systématique de l’Université d’York (2024) sur les hormones sexuelles croisées. Elle n’a tout simplement pas pu être incluse, car elle a été publiée plusieurs mois après la date de clôture de recherche des articles sur cette question (avril 2022). Parler de mise à l’écart volontaire relève donc d’une désinformation manifeste.


Ensuite, contrairement à ce que laisse entendre la tribune, cette étude n’a pas été ignorée : elle est mentionnée dans la section « Forces et limites » de la revue systématique sur les hormones sexuelles croisées :

« Ces études [dont Chen et al.] s'ajoutent aux preuves de qualité modérée selon lesquelles le traitement hormonal peut améliorer la santé psychologique, bien que des recherches solides avec un suivi à long terme soient encore nécessaires. »

  🔝

7. « montre les bienfaits des traitements hormonaux »❌

Cette étude présente plusieurs biais importants, notamment le HARKing (« formuler une hypothèse après que les résultats soient connus) : les auteurs ont changé leur hypothèse après avoir pris connaissance les résultats, ce qui va à l’encontre des principes de rigueur scientifique :

  • 6 des 8 variables figurant dans l’hypothèse du protocole de l'étude 2021 (en jaune dans l'image ci-dessous) ont disparu la version finale de l’article (2023). Elles ont bien été mesurées, mais n’ont pas été rapportées dans l’article, sans justification → Biais de publication.

    Chen hormones sexuelles croisées, transition mineurs, dysphorie de genre
    Tableau de l'annexe supplémentaire (p. 14/30) : les variables formulées (et mesurées) dans l'hypothèse de départ sont rajoutées en jaune.
  • Trois nouvelles variables ont été rajoutées dans l’hypothèse figurant dans le contenu de l’article (2023), dont la « Congruence de l’apparence », qui est plutôt un résultat attendu du traitement physique et non une preuve d’efficacité globale.

  • La « Congruence de l’apparence » est une sous échelle de la Transgender Congruence Scale (TCS), qui selon ces chercheurs, est l’échelle la plus adaptée pour mesurer la dysphorie de genre. Bien que cette échelle ait été effectivement mesurée, seul cet item précis a été retenu et rapporté dans l’article, sans justification → cherry picking.


  • Outre cette variable, les effets observés sont minimes  :

    • Pour les hommes → femmes, quasiment aucune amélioration n’a été observée sur la dépression, l’anxiété ou la satisfaction de vie.

    • Chez les femmes → hommes, on note par exemple une légère baisse des scores de dépression (de 15 à 12/63), soit un maintien dans la même catégorie clinique (trouble de l’humeur léger).

    De plus, l’absence de groupe de comparaison rend impossible toute conclusion causale fondée sur les effets observés.


  • Enfin : l’article affirme que tous les résultats vont « dans les directions hypothétiques », alors qu’il ne s’agit en réalité que des résultats qu’ils ont choisi de présenter, en modifiant leur hypothèse pour justifier leur sélection → Biais de présentation (spin)


⇒ Cette étude ne peut donc pas être utilisée pour justifier la généralisation de ces traitements.

🔎 Post critiquant en détail cette étude

8. « son équipe [de la WPATH] de 127 auteurs a évalué près de 1 500 articles scientifiques »❌

L’équipe de la WPATH n’a procédé à aucune évaluation structurée de la qualité des études (et ce n’est pas leur rôle). Les 127 auteurs n’ont fait que lire et citer des publications.

En réalité, l’évaluation scientifique a été déléguée en 2018 à une équipe indépendante du centre de pratique fondée sur les preuves de l’Université Johns Hopkins (UJH), à qui la WPATH avait commandé des revues systématiques sur treize questions de recherche, pour orienter leurs recommandations (ce qui est un processus standard).


Seulement :

L’équipe de l’UJH a effectivement réalisé de nombreuses revues systématiques, mais seules deux d’entre elles ont été publiées (Wilson et al., 2020 , Baker et al., 2021).


Pourquoi les autres n’ont-elles jamais vu le jour ?

Parce que la WPATH a stoppé leur publication.


Pourquoi ?

Car les résultats ne soutenaient pas ses objectifs de recommander les hormones et les chirurgies au plus grand nombre.

 

Comment sait-on tout cela ?

Ce fait a été révélé dans le cadre d’un procès en Alabama, via des pièces à conviction (notamment la pièce à conviction 173, p. 23/142). Des courriels internes entre l’UJH et la WPATH ont été assignés à comparaître. Dans l’un d’eux, daté d’août 2020 (pièce à conviction 173, p. 23/142), la responsable de l’équipe d’évaluation de l’UJH écrit à une représentante de l’AHRQ :

« Nous avons des problèmes avec ce sponsor [WPATH] qui tente de restreindre notre capacité à publier ».

Elle ajoute que leur équipe a trouvé :

« Peu à pas de preuves concernant les enfants et adolescents ».


Et pourtant, dans ses « Standards de soins » (2022), la WPATH justifie l’absence de revue systématique sur les adolescents par un prétendu « faible nombre d’études » disponibles, ce qui est contredit par les évaluations des preuves non publiées de l’UJH.


🔎 Page exhaustive à partir de ces pièces à conviction, qui montre comment la WPATH a intentionnellement contrôlé et censuré les preuves pour formuler ses recommandations : un procédé gravement contraire à l’intégrité scientifique.

9. «  1 500 articles scientifiques, bien davantage que le rapport Cass » ❌

Ceci est inexact : le Cass Review, via les revues systématiques réalisées par l’Université de York, a examiné une base documentaire bien plus large que ce que laisse entendre cette affirmation. Selon le rapport final du Cass Review (p. 272/388) :

« Nos recherches [de l’équipe de l’université de York] ont permis d’identifier 28 147 publications, dont 3 181 ont été jugées potentiellement pertinentes pour la série de revues systématiques associées ».


Sous couvert de défendre les droits des jeunes qui s'identifient trans, cette tribune s’appuie sur une rhétorique morale et militante, réduisant toute critique à une « vague transphobe », ce qui empêche tout débat rationnel.

Elle laisse entendre que le Cass Review est discrédité, alors qu’il repose sur une méthodologie rigoureuse, transparente et indépendante. À l’inverse, elle occulte des faits majeurs sur la WPATH, qui minent la crédibilité de leurs recommandations.

:

Ces jeunes ont, comme tous les autres jeunes, le droit d’accéder à des soins médicaux fondés sur des preuves solides.

La rigueur scientifique est donc non seulement importante, mais indispensable.

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